dimanche 26 juin 2022

En manque de rêves

 Aujourd’hui, je revois la plage que nous aimions tant. Elle n'a pas bougé.

Contrairement à nous..  

Claire, elle, a disparu dans la nuit. Absorbée par l’obscurité. Dévorée par l'envie de se fondre dans le décor.  


Partie sur un coup de vent, dispersée dans les embruns d’une aurore embrumée. Emportant avec elle mes larmes silencieuses teintées de rouge.  


Mes doigts qui aimaient tant caresser son cœur, tremblent comme un jeune apprenti. Je frissonnais malgré une douce torpeur enivrante. Jamais je n'aurais cru vivre cela un jour.  


Du haut de cette falaise, le ciel me semble toujours aussi beau malgré la tristesse ancrée dans son sein. La houle réveille les vagues, de l’écume jaillissant de leurs lèvres enragées. J'avais envie de plonger dans leurs sourires, de me noyer dans leurs entrailles et de sombrer en hurlant mon désarroi.  


Soudain, je tombai à genoux, les mains dans les herbes hautes. Les enfouissant dans la terre la fraicheur me fit du bien. Espérant retenir des restes futiles de notre histoire.  


Après un dernier cri, je m'effondrai dans le silence d'or. Le réveil fût brutal, encore plus que le goût de cendres et le cœur en morceaux.  


La réalité fait plus mal que le rêve parce que l'on doit vivre avec ses manques.  

lundi 20 septembre 2021

Singularité

 Aujourd’hui tu as brisé mon cœur et je m'efforce encore de ramasser les morceaux éparpillés ici et là.  

C’est vrai que j’avais mis la barre assez haut mais tu t'y es accrochée avec toute la détermination dont tu sais faire preuve.  


Je ne t'ai pas vu venir à pas de loup, tel un chat se glisse dans l’ombre de la nuit.  


J'entends encore ta voix douce me murmurer des mots colorés au goût si particulier qu'ils coulent au creux de ma gorge.  


Je respire encore ton odeur parfumée de fiel évoluer dans des nuages veloutés, s’effilochant en volutes vers le ciel larmoyant.   


Je te revois gravir les marches de notre amour en tenant à la main un bouquet de fleurs, faisant briller tes yeux d'une lueur indescriptible.  


J’avais cru un instant ne jamais revivre cette sensation de plénitude propre aux amoureux. C’était sans compter sur ta joie de vivre et ton audace à faire chavirer mon cœur dans ce que j’appelle tes filets.   


Et, au sommet de nous, tu m'as laissé tomber et m'écraser au sol avec fracas, me brisant comme un miroir éclate le reflet de son double.  


La nuit est apparue avec la certitude de ne jamais te revoir si ce n'est en photo, exposée aux saisons intemporelles, sur ta tombe.  


Au moins la vie ne meurt pas autour de toi 


Je respire encore…  

samedi 24 juillet 2021

Le Voyageur du Temps, Le Coeur

 Quand je suis venu au monde, il était déjà là. En poussant mon cri, si j’étais en vie, c'était grâce à lui. Plus tard, j’ai pensé que jouer avec lui renforcerait notre lien mais c’était tout le contraire. Je ne pouvais respirer sans le solliciter. Il lui fallait de l’air en permanence pour ne pas étouffer et s’en donner à cœur joie. 

Malgré ces débordements, il me faisait tourner la tête. J’en eus souvent le souffle coupé. J'avais décidé de le tester en le faisant travailler plus que nécessaire. Je me mis à fumer, à arrêter le sport et à tomber amoureux. Le cocktail fût détonnant. Je ne savais plus où donner de la tête. Mes sens étaient en ébullition. Mais, paradoxalement, j'en tirai certains plaisirs non négligeables. La cigarette me faisait tourner la tête et l'amour me la fit perdre. Entre les deux il balançait, incapable de se décider sur la marche à suivre. Ce fût l’explosion des sens et la magie de l’instant.  

À la fac, je m'enlisais dans des soirées interminables à refaire lee monde et tester différentes façons du plaisir au contact éphémère de filles. Elles avaient chacune une expérience nouvelle à m’apporter. Et puis, je finis par trouver celle qui me fit chavirer.  

J'ai cru me noyer dans ses yeux, m'asphyxier à l'ivresse de sa peau mais sa langue me ramenait toujours à la surface de ses lèvres douces et humides. Nous nous sommes mariés, avons eu des enfants. Et quelques années passées, lorsque je pus souffler, il me rappela à l'ordre. Il sembla fatigué, bien plus que moi. Il finit par s’arrêter pendant de longues minutes mais on finit par le ramener à moi.  

Il battit par à - coups mais bien plus lentement et sembla plus que jamais proche d'en finir avec la vie.  

Depuis ce jour, je reste assis, à regarder pendant des heures les minutes s’écouler. 

J'ai peur de perdre le seul ami que je n’ai jamais eu de toute ma vie, mon cœur….  


dimanche 4 juillet 2021

SleepWalker, Le Somnambule

 Je m'endors doucement, sombrant dans les limbes opaques et dénaturés de mon esprit. J'entends la douce musique aérienne du marchand de sable au loin. Mais cette fois-ci je n'ai pas envie de le laisser m’emporter. Empruntant un passage je m’enfonce dans les chemins escarpés de mes rêves. Je glisse sans un bruit sous le tapis du vent, distillant son souffle à celui de mes pas. J'aborde un champ de lavande, humant les senteurs avec ardeur. 


M'écroulant parmi les herbes sauvages je savoure le prix d’être réveillé. Puis, je m'évade en surfant sur la vague de légèreté. Je m'envole, aspiré par le ciel et consume une mèche folle sur l'autel du soleil.  


En chute libre, je vois la mer se rapprocher avant de noyer mes cris dans ses bras. Me laissant embarquer par un dauphin, je gagne la plage brûlante d’une île sans nom.  

M'allongeant sur le sable blanc, j’ai fermé les yeux, l’espace d'un instant. Le temps de me retrouver en apesanteur, flottant dans l’espace imaginaire de mon cerveau. Je dérive à la recherche de sensations extravagantes. J’erre entre çà et là, parmi la réalité de mon intemporalité.  


J’explore la carte de mes désirs, naviguant sur la barque de mes délires, poussé par un souffle dégrisé et envoûtant. Je suis mon instinct à la trace, happant les perles de joie, aspirant les effluves d’insouciance et m’affale, repu, dans un délice au miel polaire. 

 

Fourbu et émerveillé par l’extase de mes aventures, la sonnerie de mon réveil m’a ramené dans le monde du réel. Une voix au loin m’a demandé si je comptais passer toutes mes nuits sans lui. 

 

Chut, je ne suis pas encore réveillé…   

mardi 13 avril 2021

Café noir

Ce matin - , il avait dit à sa femme qu'il irait boire un pot avec les copains du boulot. Qu'il ne rentrerait pas tard. Elle l’avait écouté d’une oreille distraite, sachant très bien qu'il serait déchiré. Qu'il ferait pourtant son possible pour ne pas la réveiller mais évidemment, il laisserait tomber son smartphone juste avant de se coucher en soufflant comme un asthmatique. Il se collerait à elle lui arguant qu’avec un baiser à trois grammes elle se rendormirait certainement plus vite. Il lui soufflerait son haleine chargée en whisky directement dans le cou, la forçant ainsi à respirer les relents vaporeux du contenu de son estomac. Alors qu'il s'endormirait en un souffle fétide il lui faudrait plus de temps pour faire le vide avec les ronflements plus sourds qu’un train de marchandises. Finalement, elle irait dormir dans le canapé du salon en ne manquant pas de se cogner le petit orteil contre la table basse.  

Ce matin, elle n'a pas eu à lui souhaiter une bonne journée parce qu'il était déjà parti quand elle s’est réveillée. Profitant du soleil et des oiseaux pour sa journée de repos, elle s’est dit que ça faisait du bien d'être au calme en buvant son café sur la terrasse.  

En écoutant la radio, elle est tombée sur les infos habituelles. Et soudain, son cœur s'est arrêté avec un flash spécial.  


Un braquage de banque a mal tourné et un flic a pris une balle. Il s’appelait….  

 

Le temps s’est suspendu et en jetant une rose sur le cercueil dans le trou elle a repensé à cette nuit - là. Parce que maintenant sa main sur son épaule lui manque. Son souffle dans ses cheveux aussi. Tout lui manque. Et surtout il lui manque.  


Si elle avait fait un geste vers lui, ne fût-ce qu'un baiser sur son front. Parce qu'en 24h une vie bascule. Et une autre  est dévastée.  


Parce qu’on pense toujours que la vie est immortelle. Oui, elle l’est, mais pas ceux qui la composent.  


En levant les yeux vers le ciel, regardant le soleil briller, elle se dit que son café n'aura plus le même goût pendant une éternité….